Il y a des histoires de leadership qui ne laissent pas indifférent. Celle de ce directeur général d’une grande association en est une. Quand il a été nommé à la tête de l’organisation, celle-ci était au bord de l’effondrement. Structurellement affaiblie, usée par des habitudes devenues obsolètes, elle avançait par inertie, sans cap clair, ni énergie suffisante pour rebondir.
Face à ce constat, il n’a pas hésité. Il a retroussé ses manches et engagé une profonde réorganisation. Il a revu les manières de faire, supprimé les processus qui n’avaient plus de sens, et remis à jour l’ensemble du fonctionnement pour permettre un redémarrage solide. Il a été la locomotive. Il a pris sur lui, a tiré l’ensemble de la structure comme on aide une caravane à traverser un fleuve en crue.
La traversée a été rapide, presque fulgurante. Mais elle n’a pas été sans coût.
Résistance au changement : un phénomène humain
Car derrière les transformations structurelles, il y a les personnes. Et chez les salariés, le changement, aussi nécessaire soit-il, suscite des réactions : crainte de perdre ses repères, sentiment d’injustice, fatigue, tensions, blessures, ressentiments.
La résistance n’est pas une erreur de parcours, elle est une réaction naturelle. Elle dit l’attachement à ce qui fut, elle exprime aussi le besoin de sens, de sécurité et de reconnaissance. Mais pour celui qui mène la barque, cela peut devenir épuisant. C’est exactement ce qu’a vécu ce directeur. Il a pris l’organisation sur ses épaules. Il a tenu bon. Il a fait en sorte que tout le monde traverse. Mais aujourd’hui, une fois arrivés de l’autre côté, les tensions persistent. Les blessures aussi.
Après le passage, reconstruire
On pourrait croire que le plus dur est fait une fois la transformation enclenchée. Mais en réalité, une autre phase commence. Celle de la reconstruction humaine. Car si l’organisation a changé de rive, les équipes, elles, ont besoin de retrouver leurs marques, de panser leurs plaies, de se réapproprier leur travail dans un nouveau cadre.
Ce temps est essentiel. Nécessaire pour que les tensions retombent, pour que chacun trouve à nouveau sa place, pour que les rancœurs fassent place à la reconnaissance. Et ce temps, le dirigeant aussi doit le prendre. Pour reprendre souffle. Pour relâcher la pression. Pour ne pas rester seul, ou épuisé au bout du chemin.
Le prix du courage managérial
Cette histoire n’est pas unique. Elle raconte ce que vivent de nombreux dirigeants dans les associations, les PME, les services publics. Transformer, réinventer, sauver. C’est admirable. Mais cela ne se fait pas sans coût humain. Et surtout, cela ne peut se faire durablement sans accompagnement.
Accompagner le collectif, reconstruire la confiance, soutenir le dirigeant dans la durée : ce sont les clés pour que l’élan de transformation ne devienne pas une usure silencieuse. Car il ne suffit pas de traverser le fleuve. Il faut encore apprendre à vivre sur l’autre rive.